Normes sismiques, thermiques, acoustiques, d'accessibilité, incendie... L'inflation de la règlementation aurait fait grimper de 15 à 20 % le coût de la construction en quinze ans en France.
Sous l’égide du ministère du Logement, une réflexion est engagée pour en réduire le nombre des normes de construction.
Si les normes contribuent à améliorer la qualité des logements, elles sont aussi un facteur non négligeable de la flambée de leur prix de revient. Le coût de construction d’un logement neuf a pratiquement doublé en une décennie, ont affirmé huit organisations du secteur (FFB, FPI, UMF, Snal et les bailleurs sociaux réunis au sein de l’USH) en lançant un appel « à la simplification des exigences normatives », en décembre.
Et le 9 janvier, le président François Hollande est allé dans leur sens, en fixant l’objectif de réduire de 10 % le coût de construction d’un logement collectif d’ici à 5 ans, grâce à la simplification des quelque 3 700 normes régissant le secteur du bâtiment.
Au sein d' »Objectif 500 000″, des professionnels du secteur, promoteurs, artisans, architectes, bailleurs sociaux… se réunissent depuis quelques semaines pour trouver les moyens de concrétiser l’objectif gouvernemental – pour l’heure hors d’atteinte – de construire un demi-million de logements par an. Quatre groupes de travail, chapeautés par un comité stratégique dirigé par l’architecte Yves Lion, ont été mis en place.
Outre la simplification des normes de construction, ils sont consacrés au foncier, à l’adaptation de l’offre aux besoins de chaque génération et à l’innovation.
Chaque groupe a remis une première mouture de son rapport. Et sur le sujet peu consensuel de la simplification des normes, où les intérêts sont parfois divergents et où divers lobbies donnent de la voix, « ça frictionne un peu », résume l’un des participants. Dirigée par Nadia Bouyer – ex directrice de cabinet du précédent ministre du Logement, Benoist Apparu -, cette réflexion est de loin la plus complexe.
- L’accès des handicapés, sujet sensible
Le 21 février, le fruit de ces travaux sera remis à la ministre du Logement Cécile Duflot, et quelques-unes des pistes d’action dégagées pourraient être mises en oeuvre dans la foulée, par voie réglementaire ou législative. « Certaines décisions sont faciles à prendre, d’autres sont plus compliquées », estime Nordine Hachemi, Pdg du promoteur Kaufman et Broad.
Selon lui, construire une seule place de parking par logement, au lieu de deux, se traduit par une économie de 6 000 euros, soit 3 % d’un prix moyen de celui-ci (200 000 euros). « De même, l’obligation d’apporter la fibre optique de chaque opérateur nous impose d’installer 3 ou 4 armoires dans un logement, alors qu’une seule sera utilisée », fait-il valoir.
Sujet bien plus sensible, la question de l’accessibilité des logements aux handicapés doit aboutir à un plan d’action à la fin du premier semestre, dans le cadre du comité interministériel du handicap. Un état des lieux de l’accessibilité a été confié en septembre par le Premier ministre à la sénatrice socialiste de l’Essonne Claire-Lise Campion.
Du côté des professionnels, on espère qu' »un peu de souplesse » sera introduite dans ces normes d’accessibilité, auxquelles répondent 84 % à 99 % des logements neufs construits aujourd’hui, selon Mme Campion.
« Mais ce sont les normes qui finissent par dessiner le logement !« , se plaignent de manière récurrente les promoteurs : les salles de bains et les toilettes sont jugées surdimensionnées, au détriment des autres pièces, pour permettre la circulation des fauteuils roulants.
Il s’agit aussi d’inventorier le maquis de normes qui se sont empilées, relatives à la protection incendie, à l’acoustique, aux ascenseurs, à l’accessibilité, au sismique, à la performance thermique, à l’amiante, au plomb… Ceci afin de réduire les formalités administratives, obligations de mesures, contraintes et de prescriptions – « parfois délirantes », voire contradictoires, selon les professionnels – qui en découlent.
Ils souhaitent notamment qu’une concertation précède toute nouvelle norme ou réglementation.
« Et il faut travailler sur tous les tableaux, la construction neuve comme la rénovation« , rappelle Sabine Basili, vice-présidente de la Capeb (artisans du bâtiment).
Quelques mesures de simplification ont déjà été prises par ordonnances en 2013. Les maires ont par exemple été autorisés à déroger à l’obligation, inscrite dans leurs plans locaux d’urbanisme (PLU), d’avoir deux parkings par logement pour les constructions situées à moins de 500 mètres des transports. « Il faut un pacte de confiance, qu’on nous fixe des objectifs mais qu’on nous laisse aussi de la liberté. Qu’on n’aille pas jusqu’à nous imposer la forme des boutons de porte ! », s’exclame Catherine Jacquot, présidente de l’Ordre des architectes.