Pour éviter de vendre leur maison au rabais, certains couples préfèrent retarder leur séparation. Pour d'autres, la vente allonge la procédure.
Enquête
La crise économique a parfois des effets inattendus. Soizic Savin-Grosso est notaire à Rennes. Elle conseille un couple qui souhaite divorcer et qui est propriétaire d’une maison isolée à la campagne. Il n’y a pas si longtemps, un tel bien aurait pu partir à un prix confortable. Mais en temps de crise, c’est typiquement le genre de maison qui se vend sensiblement moins cher. « Résultat : ils ont décidé de vivre ensemble encore un peu, le temps de trouver un acquéreur qui leur permette de retomber sur leurs pieds« , constate le notaire.
La crise immobilière inciterait-elle les couples à retarder leur divorce ?
Cette tendance a été observée, depuis quelques mois déjà, en Angleterre et en Espagne. En France aussi, des couples préfèrent cohabiter quelques mois supplémentaires, plutôt que de vendre au rabais ou à perte.
La crise complique les séparations. En tout cas, elle allonge les procédures. « Avant, quand on vendait le bien en deux ou trois mois, avec une petite plus-value, tout se passait bien. Aujourd’hui, imaginer qu’on va vendre la maison en deux temps, trois mouvements, et diviser la somme en deux, devient plus rare », observe François-Éric Paulet, notaire à Rennes.
Une décote de 60 000 ? en trois ans
C’est le cas de Catherine et de son mari, propriétaires d’une résidence principale et d’une maison de campagne, en Ille-et-Vilaine. Ce mois-ci, leur divorce devrait être entériné par le juge. Si la résidence principale deviendra propriété de Monsieur, Catherine y réside encore, le temps de trouver un nouvel hébergement. « Heureusement, cela ne pose pas de problème. Mon ex-mari travaillant pour l’instant à l’étranger », précise-t-elle.
Le problème se pose pour la résidence secondaire. Tant que celle-ci n’est pas vendue, chacun paie la moitié des crédits. Soit 750 € par mois pour Catherine. « Je suis coincée. Je ne peux pas, à la fois, payer ce crédit et m’acheter un nouveau logement. Ou même payer un loyer de 500 à 600 € », calcule-t-elle. Que faire alors ? Catherine et son ex-mari ont consenti à ce que cette longère, isolée à la campagne, soit vendue à un moindre prix. « Il y a trois ans, cette maison était encore estimée à 320 000 €. Aujourd’hui, elle ne vaut plus que 260 000 € », soupire Catherine. C’est le prix auquel le compromis a été conclu. L’acte de vente définitif devrait être signé en juillet.
C’est justement la situation que Christophe et son épouse ont voulu éviter. Tous deux divorcent ce mois-ci. Mais, dans l’immédiat, ils ont décidé de ne pas vendre leur maison, acquise il y a trois ans. « Aujourd’hui, elle n’a guère pris de valeur », note Christophe, même pas sûr de la vendre au prix acheté.
Problème : tant que les biens ne sont pas partagés, on ne peut divorcer. Pour échapper à cette règle, le couple a dû conclure une convention d’indivision chez le notaire. Il lui en a coûté 6 000 e. Le bien reste donc propriété du couple, même divorcé, tant qu’il n’a pas été vendu. « Je préfère cela qu’être obligé de la vendre à perte », relève Christophe. En attendant, il occupe la maison. Elle a trouvé un autre hébergement.