Le nombre de crédits octroyés en un an a chuté significativement. En outre, la hausse des taux d'emprunts s'accélère en ce mois d'avril. Ainsi, décrocher un prêt immobilier devient plus compliqué.
Face à ce constat, Bercy annonce envisager un assouplissement des conditions d'octroi.

40 % de crédits immobiliers en moins sur un an

Dans son Panorama des prêts à l’habitat des ménages publié le 3 avril 2023, la Banque de France constate que l’octroi de nouveaux crédits immobiliers est en forte baisse. En effet, la production totale de crédit s’établit à 14,6 milliards d’euros à fin février 2023, soit une baisse de 40 % sur un an. Et cette tendance semble se poursuivre puisqu’en mars dernier, ce sont « seulement » 13,6 milliards d’euros qui ont été débloqués dans le cadre de l’octroi de crédits immobiliers, contre encore 18,5 milliards d’euros en octobre 2022. Cela représente une baisse de 26 % en l’espace de cinq mois.

Pour le ministère de l’Économie, « la diminution de la distribution de crédit s’explique avant tout par la remontée des taux ».  Si les taux d’emprunts s’établissaient aux alentours de 1 % fin 2021, ils ont aujourd’hui passé la barre des 3 % pour toutes les durées d’emprunt.

Cependant, Bercy prévient qu’il faut être « très attentif aux remontées de terrain » pour s’assurer que la réglementation « ne devienne pas un obstacle à l’accès au crédit et donc à la propriété de ménages pourtant solvables ».

 

S’assurer que les normes mises en place ne deviennent pas un obstacle

Suite à la décision d’assouplir le taux d’usure, recalculé chaque mois jusqu’en juillet au lieu d’une fois tous les trois mois, les autorités examinent maintenant les normes du HCSF.

« À la demande du ministre (Bruno Le Maire), des travaux d’évaluation sont en train d’être menés en lien avec la Banque de France, le Haut conseil à la stabilité financière (HCSF) et l’ensemble des acteurs concernés » explique le Ministère.

En effet, Bercy veut s’assurer que les conditions d’octroi mises en place en janvier 2022 ne freine pas l’accession au crédit immobilier à l’heure actuelle.

Pour rappel, depuis janvier 2022, le taux d’effort des ménages est passé à 35 % des revenus (contre 33 % auparavant) et la maturité de crédit a été plafonnée à 25 ans (27 ans en cas d’achat sur plans, aussi appelé VEFA). En outre, les banques disposent d’une marge de flexibilité leur permettant de déroger à ces règles pour 20 % des crédits, avec l’obligation qu’un tiers de ces dérogations visent à soutenir les primo-accédants.

Face à ces travaux de réflexion menés par le ministère de l’Économie, la Banque de France se montre plutôt réticente. Elle rappelle dans une note qu’un éventuel assouplissement des conditions actuelles d’octroi du crédit immobilier « pourrait entraîner de nombreux ménages vers des situations de surendettement« .
Elle souligne aussi que les banques n’utilisent pas toute la flexibilité dont elles disposent puisqu’elle ne concerne que 14,5% de dossiers.
Enfin, la Banque de France pointe le fait que les encours de crédit continuent d’augmenter et d’ajouter que « la moindre production du crédit immobilier, qui fait suite à plusieurs années de très forte croissance du crédit à des taux très bas, s’explique aujourd’hui avant tout par la moindre demande des ménages (qui) ont satisfait beaucoup de leurs demandes durant ces années ».

Les banques et courtiers ne partagent pas cette vision et blâment une réglementation jugée trop stricte. Ces premières affirment d’ailleurs depuis plusieurs années qu’elles sont suffisamment responsables et qu’elles pourraient attirer davantage de clients en prenant mieux en compte le reste à vivre dans les calculs.

 

Des ménages aisés également retoqués

Si les ménages modestes se retrouvent bloqués par la hausse des taux et les conditions d’octroi de crédit, de nombreux ménages plus aisés se font aussi retoqués lorsqu’ils souhaitent faire de l’investissement locatif alors qu’ils n’ont pas terminé de rembourser leur emprunt sur la résidence principale.

En cause, la méthode de calcul de l’endettement imposée par le Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF), qui oblige à rapporter l’ensemble des mensualités à l’ensemble des revenus.

Dans un échange avec le magazine Le Revenu, Ludovic Huzieux, cofondateur de la société de courtage Artémis, espère qu’il sera possible de retrouver l’ancienne méthode de calcul grâce à une augmentation des taux de dérogation dans le cadre des réflexions lancées par Bercy.

En effet, en reprenant l’exemple proposé dans Le Revenu, il est aisé de comprendre l’impact de la méthode de calcul donné par HCSF et comment ces dérogations peuvent apporter de la souplesse dans un dossier pourtant viable.

Prenons un couple remboursant actuellement une mensualité de 1 500€ pour son crédit principal et qui prévoit d’ajouter une mensualité de 1 000€ pour un futur crédit locatif.

Leurs salaires cumulés s’élèvent à 5 000€ et la banque prend en compte un loyer futur de 800€ (environ 70 à 80% du loyer total pour des raisons de sécurité).

Selon les règles actuelles du HCSF, leur taux d’endettement est de (1 500€ + 1 000€) / (5 000€ + 800€) = 43%.
Selon cette méthode de calcul, le couple dépasse largement la limite des 35 % d’endettement et ne pourra donc pas réaliser son investissement locatif.

Cependant, en utilisant la méthode des charges différentielles, le résultat est différent.
En retirant le montant du futur loyer perçu du montant de la mensualité du futur crédit locatif, il resterait finalement une charge différentielle de 1 000€ – 800€ = 200€. Soit 200€ à charge du couple tous les mois en plus de son crédit principal.

Leur taux d’endettement serait alors de (1 500€ + 200€) / 5 000€ = 34%.

Ainsi, un dossier qui était considéré comme inacceptable, car dépassant largement la limite de 35% selon les règles actuelles du HCSF, devient acceptable en utilisant la méthode des charges différentielles.

 

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