Par nécessité économique, ce jeune couple a décidé de construire lui-même sa maison. Avec trois vieux conteneurs et les conseils d'une architecte.

Pour leur « dernier voyage », ils resteront à quai. « Dernier voyage », c’est le nom d’usage des conteneurs d’occasion. Ceux qui, proches du rebut, sont vendus au rabais : 1 500 ? pièce pour des boîtes de 12 m par 2,50 m en acier Corten, ce métal qui fabrique lui-même sa seconde peau de rouille.

Les trois « derniers voyages », acquis par Sandra et Yannick sur le port du Havre, poursuivent leur route à terre. Recyclés en habitation familiale. Ancrés sur une lande près de Lannion (Côtes-d’Armor).

L’architecte et artiste Catherine Rannou a recherché le bon écho entre cette architecture et son environnement. Le site, avec sa pente du sud vers le nord, a donné l’idée de la construction sur pilotis. Cette surélévation rend accessibles les entrailles techniques de la maison, tout en évitant des fondations.

Pliage. L?inspiration japonisante se ressent dans la structure légère du toit et les parois coulissantes.

Sur les plots, une plate-forme en bois, sorte de piédestal, accueille les conteneurs. Au-dessus, une charpente en bois reposant sur des poteaux ajourés, supporte un toit translucide « gaufré » par les vaguelettes du polyester. De larges débords laissent entendre que la structure est bien protégée. Cette architecture en strates donne une impression de légèreté voire d’éphémère.

Une auto-construction cohérente

« On est dans quelque chose de provisoire qui dure », note Catherine Rannou. Basée sur une économie de moyens, cette proposition manifeste le désir d’un impact le plus léger possible sur son environnement.

La contrainte économique et la sensibilité écologique ont fortement orienté les choix du jeune couple. « Avec notre budget, nous pouvions seulement envisager l’auto-construction« , explique Sandra.

Colonne vertébrale. Espace de circulation et d?articulation, ce couloir distribue les pièces de nuit.

Auto-construire, d’accord… Mais comment faire lorsque l’on n’est pas bricoleur ? « Nous sommes tombés sur le travail de l’architecte américain Adam Kalkin, qui utilise le conteneur« , poursuit la jeune femme. L’idée fait mouche. « Nous pensions pouvoir trouver nous-mêmes l’organisation des trois volumes. On a bien fait des plans mais cela ne donnait rien de fonctionnel. »

Ce jeu de logique a séduit l’architecte Catherine Rannou : « Ma mission s’est limitée aux plans. Le reste leur appartient y compris l’idée de recycler des conteneurs. S’ils n’avaient pas été d’occasion, je n’aurais pas accepté, déclare Catherine Rannou, qui ne souhaite en aucun cas promouvoir le conteneur dans l’habitat. Ce qui m’a intéressée, c’est l’appui à un projet cohérent et très investi par ses commanditaires. »

Grande clarté. Les nombreuses ouvertures, le couloir translucide, les parois en polycarbonate apportent vues et lumière naturelle.

En entrant directement dans la pièce à vivre, une sensation d’espace et de clarté prévaut. Pourtant le plafond semble bas. Les percées, le couloir en polycarbonate, le décloisonnement des conteneurs écartent l’effet « boîte étroite » oppressant auquel on s’attend. La forme du conteneur s’efface même si le plan maintient des espaces plus restreints : les chambres ou ce salon de musique-bureau dont l’usage se prête bien à l’esprit cocon. Afin de gérer la thermique de cet habitat atypique, les maîtres d’ouvrage ont mis le paquet sur l’isolation : des plaques de liège et de la ouate de cellulose pour les parois, doublées avec des panneaux de Fermacel. Un vélum protégera bientôt le couloir translucide pour diminuer les surchauffes estivales.

En hiver, un poêle à bois assure le chauffage, complété par des radiateurs électriques. « Cette maison nous ressemble, confie Sandra. J’aime bien la métaphore du bateau pour décrire la manière dont on y vit : à l’intérieur comme à l’extérieur, dans une logique d’assez court terme. »

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