Mon voisin me demande une servitude de passage sur ma propriété. Suis-je obligé de la lui accorder ?
Un droit de passage, c’est quoi ?
Le propriétaire d’un terrain enclavé peut bénéficier d’un droit de passage (ou servitude de passage) sur l’une des propriétés voisines afin d’accéder à la route.
Un terrain est enclavé lorsqu’il n’a aucun accès à la voie publique ou lorsque cet accès est insuffisant pour le passage d’une voiture, par exemple.
Si le terrain de votre voisin se trouve dans une telle configuration, vous ne pouvez refuser ce droit de passage. La servitude de passage concerne aussi bien le sol que le sous-sol.
La pose de canalisation (tout-à-l’égout, eau, électricité, téléphone, gaz…) ne peut être refusée.
Aucun délai n’est requis. Même au bout de trente ans, le droit au désenclavement existe encore.
Comment se mettre d’accord ?
Les voisins peuvent convenir ensemble du droit de passage. Même s’il s’agit d’un accord amiable, il est recommandé d’établir un acte sous seing privé ou notarié pour en définir les conditions d’utilisation (tracé, largeur, plantation, véhicules autorisés…).
À défaut d’accord, c’est le tribunal qui tranchera.
Définir le tracé
C’est le trajet le plus court entre le terrain enclavé et la voie publique qui sera toujours privilégié.
Toutefois, un tracé plus long pourra être retenu au cas où la solution la plus «courte» causerait un préjudice excessif au propriétaire du terrain.
En cas de désaccord, un expert nommé par le tribunal se chargera de choisir le meilleur tracé. Ce passage pourra être modifié ultérieurement à condition que votre voisin ait une raison vraiment valable.
Des règles à respecter
Vous pouvez continuer à utiliser votre terrain comme bon vous semble.
Il est possible, par exemple, de clôturer le terrain en installant une barrière à l’entrée du chemin à condition que votre voisin puisse l’ouvrir pour passer (remise des clés).
Vous pouvez aussi planter une haie le long du passage pour préserver votre vie privée, sous réserve qu’elle ne réduise pas l’étendue du droit de passage.
Une indemnisation possible
Une telle contrainte mérite bien une compensation financière.
Elle sera proportionnelle au préjudice subi (destruction d’un mur, gêne, perte de jouissance du terrain…). Son montant pourra être fixé à l’amiable, ou par le tribunal de grande instance.
Il ne s’agit nullement d’une vente de votre parcelle. Vous restez propriétaire du terrain et à ce titre, vous devrez vous acquitter des impôts correspondants (fonciers…).
Question entretien
Le plus souvent, l’aménagement et les frais d’entretien sont à la charge de celui qui bénéficie du droit de passage. Sauf si vous l’utilisez également. Les dépenses seront alors partagées en deux.
Si un accès est créé
Le droit de passage n’a plus lieu d’être lorsque le terrain cesse d’être enclavé.
C’est le cas si le terrain a de nouveau accès à la voie publique après la création d’une route. Vous pouvez alors demander la fin de la servitude et la suppression des aménagements (portail…), y compris dans le sous-sol (câble électrique, conduite d’eau ou de gaz…).
Quid du « tour d’échelle » ?
À ne pas confondre avec un droit de passage.
La servitude dite de « tour d’échelle » permet au propriétaire d’un bâtiment construit en limite de propriété de disposer d’un accès temporaire chez son voisin pour effectuer des travaux indispensables à la conservation de sa maison (ravalement, réparation de fissures…).
Il faut que ces travaux soient impossibles à réaliser sans passer chez le voisin. Un accord entre les deux parties est suffisant, mais en cas de refus, le tribunal de grande instance peut accorder un passage temporaire. Enfin, le voisin est en droit d’obtenir une indemnité au titre du « dérangement » et des éventuelles détériorations pendant le chantier.
Source S. Jensonny, Ouest-France