Examinée par l’Assemblée nationale et le Sénat, la loi initiée par le député de Haute-Garonne, Jean-Luc Lagleize, transpose l’esprit du bail réel solidaire de l’accession sociale vers le marché libre.

Être propriétaire de son habitation, mais pas du terrain sur lequel elle est construite. Tel est l’esprit de la proposition de loi du député Jean-Luc Lagleize (Modem), adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale en novembre 2019. Ce texte pourrait bien initier une petite révolution dans le droit à la propriété.

Ce démembrement de la propriété du bâti avec celle du foncier s’inscrit dans le sillage des Organismes de foncier solidaire (OFS) introduites par la loi Alur en 2014. Il s’agit d’un outil législatif innovant pensé pour alléger le coût de l’accession sociale et sanctuariser les aides à la pierre.

La loi Lagleize va plus loin en élargissant le dispositif à des ménages dont le plafond de ressources dépasse celui de l’accession sociale.

 

La loi Lagleize propose un dispositif similaire au bail réel solidaire, en l’élargissant aux ménages dont le plafond de ressources dépasse celui de l’accession sociale.

 

Ce texte, qui devrait essentiellement profiter aux classes moyennes, prévoit la création d’OFL (Offices fonciers libres). Selon le député, ces « sociétés d’économie mixte alimentées en majorité par des capitaux publics » seront chargées d’acquérir les terrains sur lesquels seront construits les logements et de gérer les baux des propriétaires.

Une redevance qui interroge

Car si les ménages candidats bénéficient d’une décote sur le prix de leur achat immobilier, ils devront s’acquitter d’une redevance pour l’occupation du terrain, comme c’est le cas des primo-accédants en bail réel solidaire (BRS).

Et c’est bien le montant de cette redevance qui pose question. Dans le cas du BRS, le montant est réduit de par le mode de financement de l’acquisition du foncier. L’OFS qui en reste le propriétaire bénéficie de prêts à très long terme accordés par la Banque des territoires, et de la participation financière des collectivités territoriales. Or les OFL ne devraient logiquement pas bénéficier des mêmes niveaux de financements publics. Contrairement à un bien acquis en BRS, la revente ne serait donc pas soumise à conditions, mais laissée totalement libre. La proposition de loi est actuellement entre les mains du Sénat avant de revenir en seconde lecture à l’Assemblée nationale. Une navette législative à suivre de près.

28 novembre 2019

C’est la date à laquelle la proposition de loi portée par Jean-Luc Lagleize est adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale. Son but : réduire le coût du foncier et augmenter l’offre de logements accessibles aux Français. La proposition de la « loi Lagleize » devait passer devant le Sénat le 1er avril dernier, cependant du fait de la crise sanitaire, son examen est reporté sans nouvelle date actuellement.

« Le financement des Offices fonciers libres pose question »

L’avis de Maître Alain Gautron, notaire à Saint-Malo :

La proposition de loi du député Lagleize s’adresse directement à des ménages qui se situent dans une tranche de revenus intermédiaires et non éligibles à l’accession sociale en bail réel solidaire: des cadres moyens qui vont payer leur logement au prix du marché libre, très élevé dans les zones tendues comme Saint-Malo ou Rennes.

Ce dispositif introduit un principe de démembrement de la propriété du foncier et du bâti afin de faire baisser le coût d’achat d’un bien immobilier. Les projections tablent sur une baisse de 20%.

Or, plusieurs points posent question. Comment les Offices fonciers libres (OFL) vont-ils financer l’achat de terrains au prix du marché ? Il est peu probable dans la conjoncture actuelle que des fonds publics soient engagés à cet effet. Les OFL seront-ils alimentés par des fonds privés bénéficiant d’incitations fiscales ? Les investisseurs privés type SCPI (Société civile de placement immobilier) pourraient placer des fonds dans le cadre de ces OFL, mais seulement sous condition de rentabilité. De fait, les acquéreurs auraient des niveaux élevés de redevance à payer. Ce qui revient à payer un loyer. Je reste sceptique face à ce modèle à mon sens un peu régressif et fortement imprégné du système anglo-saxon.

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