Comment accroître l'offre de logements en temps de crise ?
» la question a été débattue au Marché international des professionnels de l’immobilier, le jour même où des mouvements citoyens européens accusaient la manifestation de prôner la « marchandisation du foncier ».
Ce XXVe marché se tient jusqu’à vendredi au Palais des Festivals, sur la Croisette de Cannes. Il offre une vitrine à de vastes projets immobiliers en quête de financements et réunit quelque 20.000 participants : investisseurs internationaux, assureurs, banquiers, fonds de pensions, ou encore promoteurs et collectivités locales.
Ce « speed dating géant » des professionnels de l’immobilier, selon la formule d’un habitué, est émaillé de débats sur la « diversification de la gestion d’actifs », « l’attractivité des territoires » et leurs « fractures fiscales », ou encore la « régénération urbaine » et « l’immobilier en 2030 ».
Mercredi, une question presque insolite dans cet environnement très financier, celle du déficit de logements accessibles aux classes moyennes en Europe, a été débattue devant un public clairsemé.
« Comment produire davantage de logements ? la réponse n’est pas simple, mais il est certain qu’elle nécessite des politiques publiques de long terme », a estimé le Finlandais Hannu Penttilä, responsable de la planification urbaine et de l’immobilier à la municipalité de Helsinki. Principal propriétaire foncier de la ville, Helsinki assure son développement sur ses propres terrains, « ce qui lui permet de produire des logements, y compris sociaux, à des prix inférieurs à ceux du marché », a-t-il rapporté. Le coût du foncier ne représente ainsi que 11 % du prix de revient de la construction de logements, contre parfois 60 % en France.
« Nous possédons 60.000 logements, soit 20 % du marché locatif », ce qui contribue à maintenir « un environnement d’investissement paisible, où l’on ne recherche pas des taux de rendement exagérés », a encore dit M Penttilä.
– Les « antis » privés de Croisette –
« La propriété du foncier est une question cruciale, et la mobilisation des abondants terrains des collectivités publiques sera la seule façon de répondre aux besoins en logements », a renchéri le promoteur britannique Mark Reynolds, Pdg de la société Mace. « Les pouvoirs publics et les investisseurs privés doivent travailler main dans la main », a-t-il affirmé, louant le volontarisme de la municipalité de Londres ou celle de St Petersbourg en Russie, laquelle « fait sortir de terre 13.000 logements en une seule opération ».
Plutôt que de soutenir l’accès à la propriété par de coûteuses aides publiques qui contribuent à faire monter les prix immobiliers, les Etats devraient veiller au bon fonctionnement du marché locatif, a déclaré de son côté l’économiste de l’OCDE Angelica Salvi Del Pero. Ainsi l’Allemagne a-t-elle réussi à mener « une politique équilibrée, en encadrant les loyers du marché privé, qui sont restés à des niveaux raisonnables, tout en concédant des avantages fiscaux aux investisseurs« , a-t-elle souligné. « La location est ainsi à la fois une option de long terme pour les familles et un placement rentable pour les investisseurs« , a conclu Mme Salvi Del Pero.
Au même moment dans Cannes, un Anti-Mipim populaire était organisé pour la première fois par une Coordination européenne pour le droit au logement et à la ville. Venus d’une dizaine de pays, ces mouvements citoyens, associations de défense de mal-logés et de sans-abris, ont dit « Non à une marchandisation du foncier » qui chasse les plus modestes des villes et accroît les inégalités. Ils n’ont pas pu interpeller les participants au Mipim, la municipalité ne leur ayant pas autorisé l’accès à la Croisette.