Aujourd'hui, nous allons vous parler deux schémas juridiques souvent confondus : le démembrement et l'indivision. Vous avez déjà entendu parler de ces termes, mais vous n'êtes pas sûr de bien comprendre la différence ? Pas de panique, nous sommes là pour vous guider.

Le droit de propriété, consacré comme un droit fondamental et absolu, est protégé par la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, en ses articles 2 et 17. La pleine propriété s’articule autour de trois attributs autonomes :

  • L’usus, qui confère la possibilité d’utiliser pleinement un bien ;
  • Le fructus, qui offre la faculté de percevoir les revenus qu’il génère ;
  • L’abusus, qui octroie le pouvoir de disposer librement du bien.

Dans certaines circonstances, ces attributs peuvent être répartis soit dans le cadre d’une indivision, soit à travers un démembrement.

 

Démembrement : Qui possède quoi ?

Le démembrement consiste à répartir entre différentes personnes les attributs du droit de propriété évoqués ci-dessus. Ces attributs sont répartis entre un usufruitier et un nu-propriétaire, faisant ainsi de chacun d’eux propriétaire d’un droit réel et autonome sur le bien en question. 

L’usufruit d’un bien immobilier est un droit qui permet à une personne (l’usufruitier) de jouir pleinement et d’utiliser le bien, ainsi que d’en tirer les bénéfices, sans pour autant en être le propriétaire. 

En d’autres termes, l’usufruitier a le droit de vivre dans le bien, de le louer, d’en percevoir les loyers ou les revenus, selon les modalités convenues, pendant une période déterminée ou pour toute sa vie. Cependant, l’usufruitier doit veiller à préserver la substance du bien et ne peut pas le détruire. À la fin de la période d’usufruit ou au décès de l’usufruitier, le bien revient généralement au nu-propriétaire, qui en possède la pleine propriété.

Par opposition, la nue-propriété est un concept juridique qui désigne la propriété d’un bien sans en avoir la jouissance ni le droit d’en percevoir les revenus. Concrètement, le nu-propriétaire détient uniquement le droit de disposer du bien, c’est-à-dire le droit de le vendre, de le donner en donation, ou de le léguer par exemple, mais il ne peut pas l’utiliser ni en tirer des bénéfices pendant la période d’usufruit.

Indivision : Tous ensemble, mais séparément

 

L’indivision est complètement différente du démembrement en ce sens que chaque propriétaire du bien, appelés indivisaires, possède ensemble le même bien et disposent des mêmes droits à son égard. 

Ici, il n’est donc plus question de savoir qui possède l’usufruit ou la nu-propriété, puisque chaque indivisaire est titulaire des mêmes droits sur le bien. La pleine propriété appartient donc indistinctement à tous les indivisaires, sans que leurs parts respectives ne soient matériellement distinguées.

Si chaque indivisaire a les mêmes droits sur le bien, qu’il s’agisse de l’utiliser, de profiter de ses revenus ou de le vendre, il existe néanmoins divers degrés d’accord nécessaires entre les indivisaires selon la nature des actions entreprises sur le bien.

Se retrouver en indivision peut résulter de deux situations. Dans un premier cas, l’indivision peut être choisie. C’est alors une indivision conventionnelle. C’est le cas lors d’un achat commun entre concubins, personnes pacsés ou époux ayant choisi la séparation de biens comme régime matrimonial.
Mais l’indivision peut aussi être subie, comme c’est le cas lors d’un décès par exemple. Les héritiers se trouvent ainsi en situation d’indivision pour les biens composant la succession, tant que le partage n’a pas été effectué. Il en est de même pour les époux mariés sous le régime de la communauté de biens se retrouvent en indivision tant que la liquidation de la communauté n’a pas été effectuée. Ce type d’indivision est qualifié d’indivision légale.

Accord de toutes les parties : une condition sine qua none en indivision ? 

 

En indivision, il existe plusieurs degrés d’accords nécessaires en fonction des actes que vous souhaitez effectuer sur le bien.

Dans le cadre d’un acte conservatoire, comme des travaux de réparation de la toiture par exemple, vous pouvez prendre seul.e la décision. En effet, un.e indivisaire peut prendre seul.e les décision nécessaires à la préservation du bien.
En ce qui concerne les actes de gestion, tels que la conclusion ou le renouvellement de baux d’habitation, requièrent un accord à la majorité des ⅔.
Enfin, pour les actes de disposition, tels qu’une vente, le consentement unanime de tous les indivisaires est la règle. 

Néanmoins, en cas d’opposition, l’obtention d’une autorisation judiciaire de vente sera nécessaire et devra s’articuler comme suit : 

Le ou les indivisaire.s pourront obtenir la vente du bien à la condition d’exprimer à la majorité des deux tiers son/leur intention devant notaire.

Ce dernier disposera d’un délai d’un mois pour signifier cette intention à l’indivisaire réticent, qui aura à son tour trois mois pour faire connaître son intention. S’il s’oppose toujours à la vente, le notaire devra alors dresser un procès-verbal de difficultés. 

Il faudra ensuite adresser une requête au tribunal judiciaire afin d’obtenir une autorisation de vente en démontrant que la vente ne porte pas « d’atteinte excessive aux droits des autres indivisaires » (article 815-5-1 du Code civil).

Toutefois, ce n’est pas la seule solution pour sortir de l’indivision.
Si l’un des indivisaires souhaite vendre sa part, il en a le droit. En effet, le Code civil prévoit que « nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision ». Cela signifie que chaque co-indivisaire a le droit de sortir de l’indivision quand bon lui semble. Dans ce cas, il doit d’abord proposer aux autres propriétaires de racheter sa part du bien immobilier. Il peut également soumettre cette proposition à un tiers, mais il est tenu d’informer préalablement les autres indivisaires, qui bénéficient d’un droit de préemption et disposent d’un délai d’un mois pour répondre à l’offre de vente.

 

Aucune décision ne peut forcer la vente d’un bien démembré 

Le démembrement de propriété offre au nu-propriétaire de nombreux avantages, dont le principal est qu’au décès de l’usufruitier, le nu-propriétaire devient plein-propriétaire tout en étant exonéré de droits de succession.

Mais pour diverses raisons, il peut arriver que le bien immobilier soit cédé avant le décès de l’usufruitier (volonté de l’usufruitier de changer de domicile, besoins de liquidités ou contraintes économiques par exemple).

Dans ce cas, il s’agit de vendre la pleine propriété du bien à un acquéreur, alors que la nue-propriété et l’usufruit appartiennent à des personnes distinctes. 

Ainsi, comme pour l’indivision, pour vendre un bien détenu en démembrement, il faut l’accord de toutes les parties : le ou les usufruitiers et le ou les nus-propriétaires. 

Cependant, en démembrement, il n’existe aucune possibilité ni pour l’usufruitier, ni pour le nu propriétaire, d’obliger l’autre à vendre son droit. Contrairement à l’indivision, comme le précise l’article 815-5 du Code civil, aucune décision ne peut forcer la vente à l’une ou l’autre des parties. 

La conciliation ou le rachat des parts seront les seules solutions possibles.

 

Dans tous les cas, afin d’être bien préparés et éviter les mauvaises surprises, nous vous recommandons de faire appel à un notaire pour vous accompagner dans vos démarches. 

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