Les agents immobiliers gagnent beaucoup d’argent, roulent en voitures de luxe, mangent dans des restos chics et jouent au golf.
L’image fait sourire... et pourtant, elle colle à la peau de la profession.
Alors, combien gagne réellement un conseiller immobilier ? Décryptage
Lorsqu’on parle de rémunération en immobilier, de nombreux fantasmes circulent. On connait tous le cliché de l’agent immobilier qui vit la grande vie, engrangeant des commissions mirobolantes pour un salaire à 5 chiffres après seulement quelques ventes.
Oui, les commissions représentent des montants importants et peuvent sembler élevées. Il est vrai aussi que certains conseillers gagnent très bien leur vie.
Mais derrière ces chiffres bruts se cache une réalité bien différente : entre frais, charges, part d’agence et URSSAF, le compte final est souvent loin du fantasme.
Alors, à combien s’élève le revenu moyen d’un conseiller ?
Des commissions d’agence, pas des salaires d’agents.
Les frais d’agence, c’est un peu comme les fameux frais de notaire dont je vous parlais dans l’article du mois dernier. En réalité, ils sont pour majorité constitués de taxes.
Prenons un exemple concret :
Un acheteur doit verser 12 000 € de commission à l’agence en charge de la vente. Le réflexe est souvent d’associer ce montant à une rémunération nette pour l’agent.
Pourtant, la réalité est bien différente puisque sur 12 000 €, il y a d’une part :
- 2 000 € de TVA perçue par l’état
Puis sur les 10 000 € HT restant :
- l’agence va conserver sa part, de 60% en agence traditionnelle à 30 ou 20 % en réseau de mandataires indépendants
Cette part d’agence sert à financer entre autre : les loyers, les frais généraux, les salaires, les outils marketing, la publicité, les logiciels, les formations internes, la diffusion sur les portails d’annonces immobilières.
Autant de charges que doivent absorber les agences dans leur part du gâteau et qui ont beaucoup augmenté ces dernières années.
Que reste-t-il pour l’agent immobilier ?
On vient de voir qu’une bonne partie de frais d’agence partait dans des taxes et des frais. Mais alors, sur une vente, combien reste-t-il pour le conseiller immobilier concrètement ?
Sur l’exemple précédent, un conseiller toucherait donc entre 4 000 et 7000 € HT, soit entre un tiers et la moitié du montant de la commission totale de départ !
À cela, il faut déduire ses charges.
Celles-ci sont plus faibles s’il est salarié en agence traditionnelle, car prises en charge par cette dernière.
En revanche, entre redevance mensuelle, véhicule, repas, téléphonie, informatique, assurance, prévoyance, formation, frais de photographe, rétro-commission aux apporteurs d’affaires, etc… elles représentent de 500 € à 1 500 €/mois pour les agents commerciaux indépendants.
Dernier coup de rabot non négligeable : pour les agents commerciaux indépendants, l’URSAFF viendra prendre sa part, de l’ordre de 1500 € sur l’exemple précité.
Au final, sur une commission d’agence de 12 000 € TTC payée par l’acheteur, il restera environ 3 500 à 4 000 € net. On est donc loin du montant du départ, bien que très confortable tout de même.
Ce montant est parfois divisé encore par deux en cas de vente conclue en inter-cabinet (lorsque 2 agences sont impliqués dans la transaction).
Combien de ventes un agent réalise-t-il par an ?
Le nombre de ventes annuel est très variable d’un conseiller à un autre, d’une agence à une autre et même d’une région à une autre. Cela dépend de l’investissement de chacun, de ses compétences, et aussi bien entendu de son secteur, car le m² n’a pas la même valeur à Rennes, à Paris ou à Pontivy.
Il faut également savoir que dans les réseaux de mandataires indépendants, un grand nombre d’entre eux réalisent uniquement 2 à 5 ventes par an. Soit par choix , dans le cadre d’un travail à mi-temps par exemple, soit par ce que le métier est très concurrentiel. En effet, le métier est plus difficile que les émissions de télévision le laissent penser.
Il est donc tout à fait possible de très bien gagner sa vie en tant qu’agent immobilier, mais la grande majorité des conseillers touche des revenus que l’on pourrait qualifier de normaux. Et pour d’autres encore, il ne s’agit que d’un complément de revenus.
Une rémunération justifiée ?
La question de la légitimité de la rémunération des agences revient souvent.
Si l’on prend le prisme de l’acquéreur, cela peut se comprendre. Il a vu l’agent immobilier au maximum 4 fois au cours du processus d’achat :
- une fois pour la visite
- une deuxième pour la revisite
- la signature du compromis
- la signature de l’acte authentique.
Forcément, il est tentant de se dire « 4 rdv pour 12 000 € ? faut pas abuser! ». Voilà ce qu’on peut entendre.
Pourtant, en coulisses, le travail a commencé bien avant… la prospection, le rendez-vous “découverte”, l’estimation, la prise de mandat, le shooting photos/vidéos, les chiffrages travaux éventuels avec des professionnels, et bien entendu toutes les autres visites réalisées avant avec d’autres personnes, ainsi que toutes les autres actions réalisées en parallèle pour commercialiser le bien.
N’oublions pas que notre métier est rémunéré au succès, c’est-à-dire à la signature définitive. Si une autre agence a vendu le bien avant nous, tout le travail réalisé part en fumée et il faut alors tout recommencer ailleurs. Une vente qui n’aboutie pas représente une perte de temps, d’énergie et d’argent pour un conseiller immobilier.
Des services à géométrie variable
Le sujet des honoraires d’agence fait aussi grincer des dents, car certains clients trouvent que les services proposés ne sont pas en phase avec le montant des honoraires.
Effectivement, si les honoraires des agences sont généralement de 5% du prix d’un bien (de 3 à 7% selon les agences), les services proposés ne sont pas toujours à la hauteur : estimations fantaisistes, photos bâclées, dossiers non suivis, approches commerciales douteuses, compétences techniques insuffisantes, diffusion famélique sur les portails d’annonces immobilières, etc.
Heureusement, il s’agit d’une minorité, mais comme bien souvent, cela peut suffire à ternir l’image de tout un métier.
C’est donc à chaque professionnel de tendre vers un niveau de services élevé.
Dans notre métier, une exigence quotidienne importante permet à la fois de se démarquer, mais également de tirer la concurrence vers le haut.
Pour cela, il faut insister sur la formation initiale et continue, sur l’accompagnement, l’investissement sur soi et dans les moyens de commercialisation et surtout, arrêter de faire croire que le métier permet de gagner beaucoup d’argent en deux coups de cuillère à pot.
La réalité est bien différente et la télé ne montre que la partie visible et agréable de l’iceberg !
Le métier d’agent immobilier est passionnant, exigeant… et souvent mal compris. Derrière les commissions, il y a du temps, des compétences, du risque. Alors plutôt que d’alimenter les fantasmes, prenons le temps d’expliquer, de professionnaliser, et de valoriser ce que fait vraiment un bon conseiller immobilier.